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Rêveries
17 avril 2023

Le temps des fleurs - Requiem pour une Ford Galaxie

160e devoir de Lakevio du Goût

La consigne :

devoir dernier

Mes chéris, ce devoir est le dernier que je vous propose.
Je vous aurai proposé cent-soixante devoirs !
Pensez que je me suis mis dans l’idée de vous soumettre le premier de ces devoirs le 9 juillet 2019 quand Lakevio en a abandonné l’idée.
Le sujet de ce dernier devoir est triste.
D’abord parce qu’il est question d'une perte évidemment.
Mais surtout parce que c’est la mort d’un symbole.
La dame que vous voyez sur la photo est retournée « ad patres » hier, dans un silence quasi général.
Celle qui remplit, involontairement j’en suis sûr, les rêves de tous les ados des années soixante a tiré sa révérence.
Si vous vous racontiez ce que vous auriez dit de cette dame lors de la dernière cérémonie à laquelle est assistera…
Si une lectrice chérie ou un lecteur non moins chéri voulait prendre la suite, ce serait sympa et je me plierais volontiers à cette discipline car je ne souhaite pas du tout abandonner ce blog que je squatte depuis 2003 avec une infidélité à une autre plateforme jusqu'en 2006.

Dernière ligne droite avant le lancement de Space X !

Une Ford Galaxie roule sur une route longeant le lac de Thoune. Elle file dans la belle lumière du soir. À son bord, un pilote et sa cartomancienne, la cousine de Bette. Elle tire les cartes routières d’un sac en toile de jute et trace les plans du voyage dans les marcs de café qui stagnent au fond d’une tasse estampillée «Adriano’s bar».
Une photographie coincée entre les cartes routières attire l’attention du pilote.
« C’est qui cette meuf ? » « Regarde la route » lui suggère la cousine de Bette. Un éléphant rose qui stagne sur la route est évité de justesse par le bolide.
Le pilote et sa cartomancienne écoute la bande FM, le courrier du cœur occupe l’antenne.
«Elle est de quelle couleur la Ford Galaxie 
? » demande un auditeur du courrier du cœur.
«C’est qui cette meuf, tu ne m’as pas répondu. On dirait une photographie des années 60 du siècle passé 
! » « Regarde la route » se fâche la cousine de Bette. Une mini presque à l’arrêt forme le bouchon d’une longue file de voitures millésimées 2014, un cru qui ne figure pas dans la nouvelle édition de Robert Parker.
« C’est qui Robert Parker ?» demande un auditeur du courrier du cœur.

Robert Parker guide les œnologues. La Ford Galaxie est bicolore, blanche sur le dessus et vert émeraude sur les côtés, c’est une voiture américaine, modèle 1959. On distingue, sur la photographie en noir et blanc, Mary Quant. La RTS (Radio Télévision Suisse) a publié un article vendredi qui commence ainsi « La styliste britannique Mary Quant, qui a révolutionné la mode en popularisant la minijupe, est décédée jeudi à l'âge de 93 ans. Elle avait ouvert en 1955 sa première boutique, « Bazaar », dans le quartier de Chelsea alors en pleine ébullition. » Fin de citation.

À bord de la Ford Galaxie, le moteur ronronne, le pilote se laisse guider par le hasard, la cartomancienne, assoupie, rêve en couleur. Elle rêve qu’elle est sur un grand bateau blanc. Les auditeurs du courrier du cœur susurrent des mots, des mots d’amour au microphone.
Quand la grande aiguille rejoint la petite sur midi, la montre bracelet du gardien du phare des Baleines indique qu’il est minuit, l’heure des informations sur la bande FM.

Pendant le générique du journal parlé, les rares auditeurs encore à l’écoute s’attendent à ce que la voix monocorde du journaliste lise une liste interminable de guerres, de tremblements de terre, d’une éruption volcanique perturbant le trafic des aéronefs ou de confiture d’orange amer étalée sur «le déjeuner sur l’herbe» pour protester contre l’indolence des politiciens qui occultent le réchauffement climatique provoqué par les vaches affalées dans les prés, qui ruminent paisiblement des idées noires.

 

PUB :

«24 heures sur 24, la vie serait bien dure si l'on n'avait pas le Pop Club, avec José Artur.» chantent les Parisiennes.

ANNONCE :
« Le premier accroc coûte 200 francs », je répète « Le premier accroc coûte 200 francs ».

Le journaliste ouvre le journal parlé avec une nouvelle inédite, un imprévu, un coup de tonnerre dans le ciel bleu d’une journée sans anicroches particulières. Cette nouvelle stupéfiante pourrait mettre en faillite les derniers fabricants de plumes, ces plumes munies d’un réservoir rempli d’encre et qui grattent la feuille blanche. Cette nouvelle qui déchire la mi-nuit pourrait mettre sur la paille des créatrices et des créateurs. Le monde politique et celui des affaires sont en ébullition. Il faut éviter une crise mondiale du dernier carré de la liberté d’expression. Déjà, les Chinois, tel des vautours, s’intéressent à la reprise du concept.
Cette nouvelle qui bouleverse la marche du monde est lue d’une voix monocorde par le journaliste du journal parlé :
«Mes chéris, ce devoir est le dernier que je vous propose.
Je vous aurai proposé cent-soixante devoirs !
Pensez que je me suis mis dans l’idée de vous soumettre le 
premier de ces devoirs le 9 juillet 2019 quand Lakevio en a abandonné l’idée. » Fin de citation.
Sans un rictus d’amertume, sans l’ombre d’une larme qui coulerait sur un visage buriné et connu du tout Majorque, il a ses entrées, sans un tremblement de la voix, le journaliste récite l’information sur un ton monocorde. Des grésillements empêchent d’entendre la suite. Ce brouillage passager est émis par radio Caroline, 199 mètres OM (1485/1520 kHz), qui tente une résurrection depuis le vapeur « Blümlisalp » ancré dans les eaux internationales du lac de Thoune. Seule la fin du communiqué de presse est audible, « Si une lectrice chérie ou un lecteur non moins chéri voulait prendre la suite, ce serait sympa et je me plierais volontiers à cette discipline, car je ne souhaite pas du tout abandonner ce blog que je squatte depuis 2003 avec une infidélité à une autre plateforme jusqu’en 2006. » Fin de citation.

« Zut ! » lâche le pilote. Il venait d’allumer une Gauloise bleue sans filtre, d’aspirer une longue bouffée de fumée. Juste avant d’expirer ces vapeurs de nicotine, de tabac brut et de produits non déclarés sur le paquet de clopes, au moment les poumons gorgés de fumée emplissent le cerveau d’un plaisir intense, le journal avait parlé. Il avait recraché la fumée rapidement, une tirée pour rien.
La Ford Galaxie s’ennuie sur une aire d’autoroute à l’aspect fantomatique, il est minuit. Le pilote est appuyé contre la portière et la cartomancienne s’est allongée sur le capot.
« Tu connais ce mec ? » demande la cartomancienne. Le pilote allume une nouvelle Gauloise. Il avait jeté la précédente, pratiquement intacte, mais totalement gâchée par cette nouvelle surprenante, sortie du poste à galène. Il aspira la fumée, et s’en gargarisa longuement avant de répondre à la question. «C’est le Goût-des-autres, un blogueur émérite qui propose un devoir le vendredi. Il faut rendre la copie le lundi.» La cartomancienne tira une carte routière de son sac. « Il est aussi minuit dans la Creuse» lança-t-elle en dépliant ce coin de France.
La Ford Galaxie, construite au mitan du siècle passé,
est dépourvue d’écran. Il est indispensable d’embarquer un sac en toile de jute débordant de cartes routières.
« Chéri, tu pourrais reprendre le devoir du lundi, ce serait sympa »hasarde la cousine de Bette. Le pilote ne répond pas, absorbé dans l’allumage de l’avant-dernière cigarette. Il tente le jeu des ronds de fumée, réussir à faire passer un petit rond dans un grand rond.
Comme dirait Catherine, une amie de longue date,
« c’est la dèche ». Il reste une Gauloise dans le paquet qui tout à l’heure sera chiffonné et jeté par la vitre entrouverte de la Galaxie glissant sur une route déserte éclairé par une lune gibbeuse. Il reste un sandwich et un filet d’eau dans une bouteille en verre vert. Le restoroute est fermé. La station essence est ouverte, il est temps d’abreuver la Ford Galaxie.

Après avoir renseigné un étrange équipage, le pilote et la cartomancienne ont repris la route. Un cheval blanc, d’une maigreur épouvantable s’était arrêté à leur hauteur. Il était suivi par un âne que montait un homme de forte corpulence qui ronflait bruyamment. Le cavalier maigre comme son cheval, vêtu d’une armure bricolée avec des boîtes de conserve, tenant une longue pique en bois, demanda de manière courtoise, « Madame la cousine de Bette, pouvez-vous me renseigner, y a-t-il des moulins quelque part ? « Un instant ! » répliqua-t-elle en plongeant un bras ganté de noir dans le sac en toile de jute. Elle extirpa la carte de La Manche, région historique située au cœur de l’Espagne, pointa son doigt sur un tout petit moulin dessiné dans un coin de la carte. L’équipage avait disparu sans bruit. Un mirage.

Le ronronnement de la Ford Galaxie, le paysage blafard éclairé par la gibbeuse provoquent dans le cerveau de la cartomancienne une cascade de trouvailles. « Si on organisait une méga teuf, le devoir du lundi en folie, tous en minijupe, chéries et chéris, ce serait un bel hommage à Mary » 
« On mettra à donf les Beatles, on projetera sur le mur de la maison le film Kes de Ken Loach » dit le pilote. « Et aussi Deep End de Jerzy Skolimowski » ajouta la cousine de Bette.


Plus tard, bien plus tard, dans une belle lumière matinale, la Ford Galaxie sillonne les rues d’une petite ville. Le pilote et la cousine de Bette cherchent une boîte aux lettres afin d’y jeter une carte postale affranchie avec un timbre à l’effigie du Petit Prince. La photographie affichée sur la carte représente une scène printanière, saison du renouveau, un champ de cerisiers couverts de fleurs blanches. Avant que la carte ne disparaisse dans la bouche de la boîte, on a le temps de lire ceci :

Merci pour tout Monsieur le Goût
Gros bec à Heure Bleue

Le pilote et la cousine de Bette


STOP STOP STOP

Bonjour
1
er devoir de Lakevio du Goût de ChatGPT (Chat Generative Pre-trained Transformer)
A partir de ce vendredi le devoir du lundi sera totalement automatisé. Le vendredi et Le lundi à 6 heures du matin vous recevrez sur votre montre connectée : La présentation du devoir, le texte de présentation, les textes des participants ainsi que les commentaires, le tout généré par ChatGPT. Vous n’aurez plus à vous tracasser d’un manque de temps ou d’imagination, ChatGPT a pris le contrôle de vos cerveaux et du devoir du lundi !

Commentaires
E
C'est très bien écrit, c'est marrant, et plein de références à des souvenirs anciens.
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P
ChatGPT...IA... tout ça me fait peur... Oui je sais j'ai peur de tout ! :(<br /> <br /> Quelle imagination, bravo !
Répondre
A
Ah ! Radio Caroline qu'on captait du côté de Calais lorsqu'on se rendait là-bas !<br /> <br /> Une Ford Galaxy 500 ? Vert émeraude je vois très bien. Ils l'ont revendue en 1964.<br /> <br /> La cousine de Bette habitait Paris, je ne sais pourquoi mais je me souviens de son numéro de téléphone : Balzac 70 32<br /> <br /> C'est bien loin tout ça. Depuis je suis devenu un Chat-Kapété, j'arrête pas de mouliner des devoirs tous les lundis, mardi, mercredi, jeudi vendredi et le week-end on remet de l'huile dans mes rouages.<br /> <br /> Sinon ce qui a été pondu ici par Chat-Jean-Jacques c'est parfait !
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F
Nous avons toujours une carte dans la voiture, très utile lorsqu'il y a des travaux et que le GPS s'obstine à vouloir nous faire passer par là !<br /> <br /> <br /> <br /> J'admire ton imagination ! :)
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A
génial, ce délire verbal, plein de chouettes trouvailles!
Répondre
L
Je n'avais pas pensé à utiliser ChatGPT pour me remplacer.<br /> <br /> Je suis bête, dans certaines boîtes, on charge un ordinateur de recruter des humains pour faire un travail que l'ordianteur ne peut pas faire, faute de bras et de jambes...
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- Mais... c'est l'intervention de cette grosse femme... C'est un ptit peu... enfin... ça va très loin.
- C'est là que je me rends compte que malheureusement, je vous ai beaucoup moins bien réussi que le porc.

Pierre et Thérèse.
Le père Noël est une ordure 

 

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