Il automne - Londres
Feuilles d'automne
29 septembre
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La journée de dimanche en 1 minute et quelques photographies
Un dimanche à LONDRES - 29 septembre 2024 - Images, montage, réalisation Jeanjacques666
Londres
Emile Verhaeren
Et ce Londres de fonte et de bronze, mon âme,
Où des plaques de fer claquent sous des hangars,
Où des voiles s’en vont, sans Notre-Dame
Pour étoile, s’en vont, là-bas, vers les hasards.
Gares de suie et de fumée, où du gaz pleure
Ses spleens d’argent lointain vers des chemins d’éclair,
Où des bêtes d’ennui bâillent à l’heure
Dolente immensément, qui tinte à Westminster.
Et ces quais infinis de lanternes fatales,
Parques dont les fuseaux plongent aux profondeurs,
Et ces marins noyés, sous des pétales
De fleurs de boue où la flamme met des lueurs.
Et ces châles et ces gestes de femmes soûles,
Et ces alcools en lettres d’or jusques au toit,
Et tout à coup la mort parmi ces foules,
O mon âme du soir, ce Londres noir qui traîne en toi !
Emile Verhaeren, Les soirs
Le Victoria and Albert Museum à South Kensington accueille les photographies de la collection de Sir Elton John et David Furnish. Une sélection inégalée des plus grands photographes du monde, racontant l'histoire de la photographie moderne et contemporaine. Une exposition passionnante qui nous entraine aux quatre coins du monde.
Plus de 300 oeuvres par 140 artistes reconnus sont présentées avec des clichés de Zanele Muholi, Cindy Sherman, Ai Weiwei ou encore Robert Mapplethorpe. L'exposition est à voir jusqu'au 5 janvier 2025. À ne pas manquer si vous passez à Londres.
À Londres au crépuscule
Francis Etienne Sicard
Les rues en diamants et leur soyeux pavage,
Comme des serpentins lâchés des toits obscurs,
Glissent, de pas en pas, le long de mers de murs,
Tapissés du soleil de vitrine en voyage.
Un bus à impériale et son rouge ramage
Croise une limousine aux fourreaux de noirs purs,
L’un éteignant le jour et ses rêves d’azurs,
L’autre incendiant la nuit d’une ivresse volage.
La Tamise soudain se pare de colliers,
Et Big Ben se maquille à l’or de ses aiguilles,
Chuchotant des dîners, fards des joailliers.
La magicienne alors entre de scène en scène
Soulevant les rideaux dont les tons de charmilles
Font frissonner la ville aux plaisirs des mécènes.
Francis Etienne Sicard, Lettres de soie rouge, 2011
Londres
… un grave Anglais correct, bien mis, beau linge.
Un dimanche d’été, quand le soleil s’en mêle,
Londres forme un régal offert aux délicats :
Les arbres forts et ronds sur la verdure frêle,
Vert tendre, ont l’air bien loin des brumes et des gaz,
Tant ils semblent plantés en terre paysanne.
Un soleil clair, léger dans le ciel fin, bleuté
À peine. On est comme en un bain où se pavane
Le parfum d’une lente infusion de thé.
Dix heures et demie, heure des longs services
Divins. Les cloches par milliers chantent dans l’air
Sonore et volatil sur d’étranges caprices,
Les psaumes de David s’ébrouent en brouillard clair.
Argentines comme on n’en entend pas en France,
Pays de sonnerie intense, bronze amer,
Font un concert très doux de joie et d’espérance,
Trop doux peut-être, il faut la crainte de l’Enfer.
L’après-midi, cloches encor. Des files d’hommes,
De femmes et d’enfants bien mis glissent plutôt
Qu’ils ne marchent, muets, on dirait économes
De leur voix réservée aux amen de tantôt.
Tout ce monde est plaisant dans sa raide attitude
Gardant, bien qu’erroné, le geste de la foi
Et son protestantisme à la fois veule et rude
Met quelqu’un tout de même au-dessus de la loi.
Espoir du vrai chrétien, riche vivier de Pierre,
Poisson prêt au pêcheur qui peut compter dessus,
Saint-Esprit, Dieu puissant, versez-leur la lumière
Pour qu’ils apprennent à comprendre enfin Jésus.
Six heures. Les buveurs regagnent leur buvette,
La famille son home et la rue est à Dieu :
Et dans le ciel sali quelque étoile seulette
Pronostique la pluie aux gueux sans feu ni lieu.
Paul Verlaine