Un été au pied des Alpes - Musca domestica
Une mouche, posée sur l’intérieur de la vitre séparant la rue du monde des buveurs de café, piste d’atterrissage translucide, prend soin de son corps. Elle lisse les poils de ses nombreuses pattes, se coiffe et se recoiffe avec agilité avant de disparaître dans le soleil sans régler les consommations. Avant que la mouche ne s’envole vers une destination inconnue, l’apéritif d’un chien, l’encas d’un moineau ou happée par la langue curieuse d’un tamanoir géant apprivoisé, lointain descendant de Totor, géant qui exhibait Dali dans les rues de Paris, j’ai collé mon œil sur ceux à facettes de la Musca domestica pour compter qui tiendra le plus longtemps avant d’éclater de rire.
Perdu !
J’ai fait chauffer ma carte jaune (chez nous, les cartes bleues sont jaunes) pour payer la consommation de l’effrontée. Elle boit, servi dans une toute petite tasse, un doppio Malabar, aspirant le café au moyen d’un tout petit chalumeau en verre, recyclable et lavable, l’addition est toute petite.
Ces jours, alors que le mercure ne se contient pas dans son tube de verre et grimpe vers des records de chaleur, j’opte, au Versa bar, pour un doppio iced. Le café est coulé dans un verre à whisky rempli de glaçons.
Cette année, comme l’an passé, j’ai manqué par paresse mon body summer. Je ne peux donc pas me pavaner sous les arcades de la Ville fédérale en marcel pour faire admirer mes biceps bodybuildés, couverts de tatouages divers et variés sur fond de bronzage, bronzage peaufiné sur les alpages. Je cache ma vieille peau ridée et mes chairs pendantes sous un manteau de fourrure en hermine blanche. Je sue en lisant les Mystères de Paris.
Petit détour en regagnant le petit village dans les montagnes, par Brigue. J’ai vu un hibiscus aussi géant que Totor, un ciel magnifique et le Rhône qui roulait des eaux fraîchement fondues des glaciers. Le congélateur naturel, notre réserve de boisson pétillante, disparaît par une sublimation accélérée. On aura soif dans quelques années !
En fin d’après-midi retour dans la quiétude du village accroché aux montagnes, les orages ne sont pas d’actualité.
Le tamanoir géant de Dali sortant d'une bouche de métro, rue de Lyon à Paris. Photographie parue en 1969 dans un Paris Match
Doppio iced au Versa bar
LA MOUCHE
Brigue
Le petit village dans les montagnes