Été 14 - Gare de Bâle
La gare de Bâle ressemble à une fourmilière. Les voyageurs s’infiltrent dans les moindres interstices du bâtiment construit en 1860. Des bagages à roulettes suivent sans mots dire leur propriétaire.
Le ciel est chargé de nuages noirs, belliqueux, prêt à en découdre dans de violents orages.
Un train de la DB Deutsche Bahn entre en gare. Il relie Berlin à Interlaken Ost. Un voyage sans fin, pour amateurs de voyages en chemin de fer avertis.
De la fenêtre du wagon-restaurant, avant que le train ne quitte la gare, il est possible de voir deux voyageurs sur le quai d’en face portant un téléviseur HD, 4D, 7 millions de pixels au millimètre carré, qui permettra de voir, confortablement installé dans un club, la série des gendarmes avec De Funès, films des années 1960, remastérisés, recolorés, avec une nouvelle bande sonore qui fait basculer les spectateurs dans la 5e dimension ! Ce confort technique ne modifie pas le temps de trajet de Berlin à Interlaken Ost. Il faut plus de 10 heures pour aller d’une ville à l’autre. Les deux voyageurs portant la merveille technologique s’engouffrent dans un train régional jadis nommé omnibus.
Dans le wagon-restaurant de la Deutsche Bahn, les consommateurs font des sudoku, boivent des grandes bières (c’est la seule compagnie qui sert des bières pression, on se demande bien pourquoi) ou des cafés servis dans des baignoires, certains tapotent sur leur tablette électronique. Un égaré noircit les pages d’un petit carnet aux pages lignées et à la couverture noire, un nostalgique des cahiers de molesquine.
Des bruits courent que les mines d’encre sont en voie d’assèchement !
Le train arrive à Berne. Il sera temps de descendre.