« Je prends un petit rien, une anecdote, une histoire qui traîne sur la place du marché, et j’en fais une chose à laquelle moi-même, je n’arrive plus à m’arracher. Ça joue, c’est rond comme un galet. Ça tient par la cohésion de ses particules. Et la force de cette cohésion est telle que même la foudre ne saurait la briser. »
Isaac Babel en 1921, dans une conversation avec Constantin Paoustovski.
Berne, cinq minutes avant midi, Kornhaus, floraison d'un palmier Cycas
Le petit village dans les montagnes, l'orage de 21h20
L'Augstmatthorn reprend des couleurs après l'orage de hier soir et celui de ce matin, coups de tonnerre qui remplacèrent le réveille-matin.
La page demandée n’existe pas ou n’est plus disponible pouvait-on lire, à l’instar de la mire sur les écrans des postes de télévision, quand un lecteur cherchait à lire mon blog. Sueur froide, échange de lettres électroniques avec l’équipe de Canalblog, incident imprévu, bidouillages dans les entrailles des disques durs, ramollis par le soleil, et, au milieu de l’après-midi, au moment où la cafetière italienne libérait de bonnes odeurs de caféine, le facteur livre un pneu. L’équipe technique de Canalblog annonce que tout est rétabli. Il est temps de sabler le café…
Après avoir quitté le village des vacances de mon enfance, fait un détour par Brigue, pour boire un espresso rue de la gare, au bar restaurant Couronne, retour dans le petit village dans les montagnes juste avant l’orage. Une pluie diluvienne, des éclairs et des coups de semonce très forts. Le spectacle est magique, des nuages qui se trainent sur les montagnes, quelques grêlons, une brume qui envahi tout le décor, se déchire en miettes, le tonnerre s’éloigne, semble disparaître, revient en force. La nuit s’installe zébrée d’éclair. Au fond de la vallée La Lombach, gonflée par ces fortes pluies, gronde.
10h20, wagon-restaurant de la Deutsche Bahn, Interlaken-Berne (le train arrivera ce soir à Hambourg Altona), espresso genre tord-boyau, croissant au beurre tiède et délicieux, lecture, une lecture qui se déguste lentement, comme un vrai espresso, un texte qui sied bien à ce train qui semble flotter au-dessus de la voie ferrée.
11h30, doppio au Versa bar. La une de la prestigieuse NZZ, consacrée à la France, titre : « La situation dans les villes françaises est explosive »
13h25, Tibits, petite collation, espresso et lecture de la presse. Le quotidien Le Temps titre en une : « Les banlieues françaises brûlent de rage. »
17h30, cafetière italienne à la maison
Après avoir ingurgité tous ces cafés, le brouillard s’est installé dans le petit village dans les montagnes !
La consigne du Goût. On lit le Goût ICI Il me semble que Lakevio avait déjà proposé cette toile de Harold Harvey mais j’aime beaucoup cette toile alors il ne me reste plus qu’à trouver une autre idée pour éviter de me faire taxer de « recyclage ». Le moment étant à l’été et aux balades dans les prés, auriez-vous par hasard une idée de ce que pensent ces deux enfants pendant cette halte champêtre ?
Note Par un curieux hasard la proposition du Goût, pour le devoir de ce dernier lundi de juin, me donne l’occasion de terminer une histoire qui laissait entrevoir une suite, à la fin du texte la mention « à suivre » donnait l’illusion que rien n’était terminé. Les acteurs retrouvés jouent la fin de cette comédie humaine. Le début se lit ICI
Et la fête continue Il était en tenue d'été, couché dans l'herbe d'un parc parisien. Quelques fleurs de dent-de-lion égayaient la pelouse. Certaines fleurs étaient déjà en graine. Ce sont ces boules blanches qui s'éparpillent quand on souffle dessus, ce geste est immortalisé sur la couverture du Larousse, avec cette maxime, écrite au-dessus des graines qui s'envolent, « je sème à tout vent ». Le 8 mai 2017, après s’être embrassé langoureusement avec Marine, Emmanuel avait jeté sa veste sur son épaule et, avant de s’enfoncer dans sa nouvelle vie, avait donné rendez-vous à Marine dans cinq ans dans ce parc parisien où les pissenlits s’égayent.
Une pandémie s’était, dans les années 20, insinuée dans le monde, perturbant le confort des uns, jetant dans la misère les autres, les plus démunis, eux les plus nombreux. Cette période où le masque chirurgical, paravent d’un virus nouveau, devint une source de pollution, on en débusquait jusque dans le lit des fleuves ; charrié par le courant des rivières il épousait les océans, sans doute qu’une multitude de tortues aquatiques médusées par cet objet non identifié moururent en dégustant la négligence des humains, cette période perturba également les projets d’Emmanuel.
C’est le 26 juin 2023, avec un an de retard qu’il retrouve Marine dans un parc parisien. Le manque de pluie a transformé l’herbe en amas brunâtre et sec, cette année pas de graines semant au gré du vent leur savoir. Emmanuel en tenue d’été, couché dans l’inconfort de la sécheresse regarde avec tendresse Marine et murmura « les liens avec ma famille depuis la mort de mon père sont détendus. Nous pourrions… » - Maman, maman… Une bambine de cinq ou six ans, s’agrippant à la jupe de sa mère transforme les paroles murmurées en un grand éclat de rire. Blême, Emmanuel interroge, « tu es mariée Marine ? » - Absolument pas - Cette gamine ? Marine danse avec sa fille sur l’herbe devenus poussière - Cette gamine ? C’est Emma, notre fille !
Marine et Emmanuel scellent leur union par un baiser langoureux. Le trio s’engage dans l’allée centrale dans un joyeux tintamarre. En sortant du parc, ils passent, sans la remarquer, devant une œuvre de Banksy crayonnée sur la colonne de pierre frontière entre la rêverie et la vraie vie, Bansky « l’inconnu le plus connu du monde », la star de l’art urbain, celui qui manipule, intrigue et a réussi à mettre en ébullition la planète artistique mondiale. Ses œuvres arrachées à la pierre par des voleurs atteignent des millions de dollars dans les ventes aux enchères. La petite troupe qui chantait à tue-tête une chanson qui eut son heure de gloire au firmament des années 1950, traversa la rue et disparu dans le soleil tout en continuant sa chanson, la,la,la,la…
Dix ans plus tard, on apprendra en lisant une des rares feuille de chou qui s’imprimait encore, qu’ils s’étaient mariés, vivaient heureux et avaient une ribambelle de gamins.
Carrouge 24 juin [19]33 Mon cher Nicole Ton message m'a fait bien plaisir : sa promptitude, et tout cet amical souci que tu y montres de satisfaire une demande dont le sans-gêne me remplit maintenant de confusion... Accepte à tout le moins mes excuses et aussi un bien profond merci. Voici une partie de ce que tu me demandes: Adieu et Feuillets*. Ma collection d'Aujourd'hui est tout à fait incomplète, aussi vais-je demander des exemplaires à Mermod et te les faire tenir. Peut-être verrai-je Trolliet la semaine prochaine, car il y a une exposition Viollier à Genève**, et Paul (qui est au pays et est venu lundi me voir sous la pluie avec mon filleul***) me proposait d'aller la voir avec lui. J'aurais profité de l'occasion pour rencontrer Trolliet et lui demander des « mesures » exactes - mais quoi qu'il advienne de notre projet, je te renseignerai là-dessus sans trop tarder, mon cher Nicole. Au demeurant ce numéro de Présence ne paraîtra pas avant l'automne, ce qui nous donne un vaste laps. Nous voici dans l'«encore de la pluie » chaque soir à la radio. Je pense beaucoup à toi et souhaite bien fort un vif retour du soleil sur tes promenades, car j'ai vu ce qu'un mauvais mois de juin pouvait être déprimant à la montagne.
* et aussi des choses plus anciennes. Pardon pour toute cette poussière! R.
Laisse-moi te dire merci encore, mon cher ami, et reçois mes meilleurs messages.
G. Roud
P.-S. A bientôt plus long message. L'heure du courrier me talonne! R.
**Cette exposition a lieu à l'Athenée de Genève du 7 au 29 juin 1933. Le peintre genevois Jean Viollier (1896-1985) a fait partie avec Steven-Paul Robert du groupe «Le Disque ». Après une dizaine d'années passées à Paris, il est revenu en 1932 à Genève, où il fréquente les collaborateurs de la revue Présence. Roud et Viollier ont correspondu entre 1921 et 1950. ***Jean-Dominique Robert (1925-2004), fils ainé de Steven-Paul Robert ; leur visite à Gustave Roud du lundi 19 juin 1933 est mentionnée dans le journal.
Lettre extraite de : Correspondance 1920-1959 Gustave Roud Georges Nicole 1283 pages Infolio, 2009
Lundi 19 juin 1933 Je descends au train de 9 heures à Ecublens chercher Paul et Lo*. Journée pleine de gaieté et d'amitié. Magie. Cinéma. Surprise heureuse de me retrouver un langage. Avec Paul je puis causer encore - mais combien m'en reste-t-il, de ces interlocuteurs ? Je les raccompagne à E[cublens] pour le train de 7 heures. Lent retour sous la pluie et le vent.
*Surnom de Jean-Dominique Robert (1925-2004), fils ainé de Steven-Paul Robert et filleul de Gustave Roud
La première réunion de Vespa a eu lieu à Paris en 1954. Cela fait 33 ans que "Les Vespa World Days" se sont déroulées en Suisse pour la dernière fois. Aujourd'hui, par un temps splendide, les Vespa se voyaient sur toutes les routes aux alentours d’Interlaken. Des Italiens sont même passés devant le Versa, à Berne. Le car postal de 16h04 s’est fait doubler par une dizaine de machines, en pleine montée ; les Vespa fonçaient en direction du petit village dans les montagnes. Un village en pleine effervescence ce samedi de juin. Les chars de foin, nous sommes en pleine fenaison, un car de touristes venus découvrir la fabrique de cors des Alpes, des Vespa du Portugal, d’Allemagne, d’Angleterre et de plusieurs cantons suisses, une soirée country sur la terrasse du restaurant.
- Mais... c'est l'intervention de cette grosse femme... C'est un ptit peu... enfin... ça va très loin.
- C'est là que je me rends compte que malheureusement, je vous ai beaucoup moins bien réussi que le porc.
Pierre et Thérèse.
Le père Noël est une ordure